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Lymphomes sous-cutanés félins : une nouvelle entité à inclure dans le diagnostic différentiel du complexe fibrosarcome

Dr Didier Lanore Exercice exclusif de la cancérologie, ex-chargé de consultation de cancérologie de l’ENVT

Dr Didier Lanore
Exercice exclusif de la cancérologie, ex-chargé de consultation de cancérologie de l’ENVT

Introduction :

Le lymphosarcome est l’hémopathie la plus fréquente chez le chat et une des tumeurs les plus fréquentes dans cette espèce avec le fibrosarcome. Aujourd’hui, les lymphomes extra-nodaux représentent la seconde hémopathie lymphoïde en fréquence. Parmi ceux-ci les lymphomes sous-cutanés sont peu fréquents (environ 2 à 3%) mais de fréquence croissante selon notre expérience. Cette étude allemande, la première sur une grande série, décrit les données épidémiologique, clinique, histologique et thérapeutique  pour 97 chats atteints dont 69 avec un suivi clinique.

Texte :

Les résultats de cette étude sont les suivants :

  • 28% des lymphomes sous-cutanés de cette série correspondaient à une suspicion diagnostique, par le praticien, de fibrosarcome. La présentation clinique est effectivement très similaire dans 90% des cas : présence d’une masse sous-cutanée ferme non adhérente et non douloureuse. De plus, les localisations décrites sont également des sites de prédilection pour les fibrosarcomes (région interscapulaire dans 1 cas sur 5, parois latérales du thorax, lombes…). Cette tumeur doit donc faire partie intégrante du diagnostic différentiel des sarcomes sous-cutanés du complexe fibrosarcome
  • L’expérience des auteurs est peu en faveur de la cytoponction comme moyen diagnostique avec des prélèvements souvent pauvres en cellules. Notre expérience personnelle ne correspond pas à cette idée. La différence provient peut être de la manière de prélever, cherchant à éviter le centre de ces tumeurs souvent nécrotique.
  • 2,2% et 6.5% des chats testés étaient respectivement positifs pour le FIV et le FeLV
  • 74% des cas de cette étude étaient initialement en stade clinique 1. Mais cette donnée est à prendre avec précaution car un bilan d’extension plus complet que le seul examen clinique n’a été réalisé que pour 46 chats et sans qu’aucun myélogramme n’ait été effectué.
  • 83% des chats étaient en sous-stade a, le sous-stade semble être associé à un plus mauvais pronostic
  • 68% des lymphomes ayant fait l’objet d’un immunomarquage étaient d’immunophénotype B. L’immunophénotype (B ou T) n’était, par contre, pas un facteur pronostique.
  • Les marges chirurgicales, à la différence de ce qui est classiquement observé lors de fibrosarcome, étaient saines dans 97% des cas
  • 32% des chats suivis ont développé une extension métastatique à distance au cours de l’évolution de leur tumeur. Cet élément confirme que ces tumeurs ne doivent pas uniquement être considérées comme des tumeurs à agressivité locale. Ainsi et de manière logique, les meilleurs résultats thérapeutiques sont obtenus par l’association thérapies locales et systémique (chirurgie, radiothérapie et chimiothérapie).
  • 62 chats ont fait l’objet d’un traitement spécifique, la majeure partie d’entre eux (85%) ayant été traité par chirurgie seule. Seuls 9 chats ont reçu de manière isolée ou adjuvante un traitement médical et dont 4 uniquement une corticothérapie. Le nombre de cas traités par chimiothérapie ou radiothérapie est donc très faible et aucun protocole standardisé n’a été employé
  • La survie médiane globale a été de 148 jours pour les chats ayant fait l’objet d’un traitement spécifique et la période médiane sans récidive de 101 jours. Les chats n’ayant fait l’objet que d’une intervention chirurgicale ont eu une survie médiane de 135 jours, ceux n’ayant reçu que de la chimiothérapie une survie de 148 jours. La survie la plus longue a été notée pour les chats ayant fait l’objet d’une chirurgie et d’un traitement adjuvant (chimiothérapie et ou radiothérapie) avec une durée moyenne de 786 jours (la médiane n’ayant pas été atteinte)

 

A retenir :

  • Les lymphomes sous-cutanés félins sont de plus en plus fréquents et doivent rentrer dans le diagnostic différentiel des fibrosarcomes dans cette espèce.
  • Les chats présentant cette tumeur sont en général en stade 1 au moment du diagnostic initial mais 1/3 d’entre eux vont développer une atteinte à distance au cours de l’évolution de la maladie
  • La meilleure prise en charge de cette affection pourrait être une association chirurgie, radiothérapie et chimiothérapie. Un tel traitement peut permettre des survies longues (plus de 2 ans en médiane) observées cependant sur un faible nombre de cas.

Article :

Meichner, K., & von Bomhard, W. (2014). Patient characteristics, histopathological findings and outcome in 97 cats with extranodal subcutaneous lymphoma (2007-2011). Veterinary and comparative oncology, 25–29.

Photographie n°1

Le fibrosarcome et le lymphome sous-cutané ont souvent le même aspect clinique et les mêmes localisations Crédit : Didier LANORE

Photographie n°2 :

L’aspect cytologique d’un lymphome sous-cutané félin est celui d’une tumeur à cellules rondes et non d’une tumeur mésenchymateuse (cellules fusiformes). Crédit : Delphine RIVIERE-Laboratoire C-Vet